Architecture

Le château tel qu’il est né

Au moment de l’édification du château de l’Isle Savary, l’heure n’est plus à la construction de forteresses médiévales, mais l’Isle est malgré tout encore un « Château fort » comme en témoignent les douves qui l’entourent, les deux pont-levis, doubles, les trois tours carrées, l’imposant donjon, le chemin de ronde qui coiffe l’ensemble , les oubliettes, les moyens de défense que sont les créneaux, les machicoulis, les hourdes, les meurtrières, les bouches à feu, les échauguettes … Le château est entièrement construit en pierres de tuffeau et de Riche-mont, taillées et apparentes, ses murs mesurent plusieurs mètres d’épaisseur à leurs bases. Toutes les toitures sont recouvertes d’ardoises d’Angers modèle Prieuré posées au clou de cuivre cranté de 35 mm sur un voligeage de sapin de 27 mm d’épaisseur. L’Isle Savary est avec le Château du Plessis Bourré construit en Anjou à la même époque, l’un des tout derniers châteaux forts français. Mais il est en même temps un précurseur et annonciateur des grands châteaux de la Renaissance qui feront la renommée du Val de Loire. Il rassemble, peut-être pour la première fois en France, l’ensemble des bâtiments antérieurement hétérogènes et disparates qui composaient jusqu’alors un château : chapelle, cuisines, châtelet d’entrée etc… Mais ce qui frappe surtout c’est la singulière régularité du plan, la sureté des proportions, l’harmonie d’ensemble, la recherche systématique de la symétrie jusque dans les murs des douves, la qualité esthétique de la construction…

Le bâtiment du milieu, encadré de deux tours d’angles identiques offre l’aspect le plus remarquables : toute la façade est parfaitement symétrique, les tours carrées sont intégrées à l’édifice, les deux ailes en retour d’équerre dont l’une est plus courte de manière à laisser la place à un pont levis et au donjon forment et ferment une cour carrée d’allure moderne et agréable.

Quant aux intérieurs, le soin apporté à leur aménagement est également remarquable. Non seulement la vie seigneuriale peut se dérouler sous un même toit mais le tracé rectangulaire de l’ensemble qui se répète dans chaque pièce assure en même temps un maximum d’ampleur et de confort. Au moment de sa construction, et cela n’a pratiquement pas changé à ce jour ainsi que nous l’expliciterons ci-après, l’emprise au sol du château et du donjon est d’environ 1000m². Le château comporte un rez de chaussée, deux étages et un sous-sol sous la plus grande partie du bâtiment. Le donjon comporte quant à lui un sous-sol et 5 niveaux.

Les transformations du château au cours des siècles

Contrairement à de nombreux châteaux qui ont été profondément modifiés, voire reconstruits, au 19ème siècle, le château de l’Isle Savary reste globalement aujourd’hui tel qu’il a été construit dans les années 1465-1475. Ceci tient à deux facteurs principaux :

  • Il était très en avance sur son temps et esthétiquement très agréable
  • Les propriétaires successifs qui l’ont possédé notamment au 19ème siècle n’ont jamais eu l’ambition, ni les moyens de faire des modifications importantes.

Il est en effet à noter que ce sont en général les propriétés les plus pauvres qui ont le moins évolué, ce qui est d’ailleurs parfaitement logique. Le château de l’Isle Savary a toutefois « vécu ». Notamment, et encore une fois ceci n’est pas un hasard, au cours des deux grandes périodes dont il a déjà été question ci-avant. Nous voulons parler des périodes :

  • Frontenac
  • Et Jouffroy

Avant Frontenac le château a très probablement été peu modifié, en tout cas, nous n’avons guère trouvé de trace de transformations importantes si ce n’est le fait que c’est sous doute un petit-fils de Guillaume de Varye, Charles de Varye, qui a « remonté » la chapelle initialement située au rez-de-chaussée pour la placer au 1er étage, pratiquement au-dessus de la précédente, ceci en 1547.

C’est Frontenac qui a profondément transformé les jardins, qui a, très probablement, construit l’orangerie, qui a remonté le niveau du sol des douves et peut-être procédé à leur assèchement, qui a, sans doute, détruit le mur d’enceinte qui fermait la cour côté sud, qui a enfin quelque peu modifié les distributions des pièces intérieures …

Mais c’est incontestablement le Marquis puis le comte de Jouffroy qui ont le plus modifié/modernisé le château pour lui donner l’aspect qu’il a encore aujourd’hui. Le comte Jouffroy a systématique élargi les fenêtres existantes en supprimant les meneaux, et en a créé de nombreuses nouvelles, il a supprimé les deux escaliers à vis extérieurs qui permettaient dans la cour d’accéder aux étages supérieurs, il les a remplacés par un escalier intérieur monumental situé pratiquement en plein centre de la cour.

Il a transformé le double pont-levis côté sud en un pont dormant en pierre. Il a par ailleurs refait tous les intérieurs du rez-de-chaussée pour aménager de très belles pièces en style empire ou restauration…